Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/438

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Croyez-moi, Théodat, on cherche à vous surprendre ;
Plus elle vous promet, moins s’il en faut attendre,
Notre sexe pour vaincre a l’art de reculer,
Et sa plus grande force est à dissimuler…

THÉODAT.

D’un changement si prompt quel que soit le mystère,
Qu’en appréhendez-vous, et que peut-elle faire ?
Theudis s’est déclaré ; Trasimond comme lui,
Quoi que je veuille oser, me servira d’appui.
Non que jamais je puisse avoir l’âme assez basse
Pour offenser la Reine, ou souffrir sa disgrâce ;
Tous deux sur son exil auront beau me presser,
Le Ciel l’a mise au Trône, et je l’y veux laisser ;
Mais pour leur sûreté je ne saurois moins faire,
Que garder un pouvoir qui rompe sa colère,
Un pouvoir qui plus fort que son ressentiment
Les dérobe aux fureurs de son emportement.
Tout le peuple est pour moi ; les soldats et l’armée…

ILDEGONDE.

Ils aiment votre gloire et votre renommée,
À l’envi tout le monde appuiera votre sort,
Mais contre une surprise est-il rien d’assez fort ?
Pour vous en garantir je ne sais qu’une voie.
Tant de faveurs sur vous que la Reine déploie,
Doivent trop vous toucher, pour souffrir que jamais
Son exil soit par vous le prix de ses bienfaits.
Vous devez partager la puissance suprême ?
Demandez que sa main suive le diadème,
Par là vous évitez la honte d’être ingrat,
Conservez vos amis, satisfaites l’État,
Et maître de son cœur ainsi que de l’Empire,
Étouffez la vengeance où sans doute elle aspire.

THÉODAT.

Quel conseil, ou plutôt quelle injure à ma foi ?
Je vous voyois tantôt plus de bonté pour moi.
Vous ne déguisiez point que l’hymen de la Reine
Résolu tout-à-coup, vous donnoit quelque peine.