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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/583

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PIRITHOÜS.

Ne me demandez rien, il sort tout interdit,
Madame, et par son trouble il vous en a trop dit.

ARIANE.

Je vous comprends tous deux, vous arrivez d’Athènes.
Du sang dont je suis née on n’y veut point de Reines,
Et le peuple indigné refuse à ce héros
D’admettre dans son lit la fille de Minos ?
Qu’après la mort d’AEgée il soit toujours le même,
Qu’il m’ôte, s’il le peut, l’honneur du rang suprême,
Trône, Sceptre, grandeurs, sont des biens superflus ;
Thésée étant à moi, je ne veux rien de plus.
Son amour paye assez ce que le mien me coûte,
Le reste est peu de chose.

PIRITHOÜS.

Il vous aime sans doute,
Et comment pourroit-il avoir le cœur si bas,
Que tenir tout de vous, et ne vous aimer pas ?
Mais, Madame, ce n’est que des âmes communes
Que l’Amour s’autorise à régler les fortunes ;
Qu’Athènes se déclare, ou pour, ou contre vous,
Vous avez de Minos à craindre le courroux,
Et l’hymen seul du Roi peut sans incertitude
Vous ôter là-dessus tout lieu d’inquiétude.
Il vous aime, et de vous Naxe prenant la loi,
Calmera…

ARIANE.

Vous voulez que j’épouse le Roi ?
Certes l’avis est rare, et si j’ose vous croire,
Un noble changement me va combler de gloire.
Me connoissez-vous bien ?

PIRITHOÜS.

Les moindres lâchetés
Sont pour votre grand cœur des crimes détestés,
Vous avez pour la gloire une ardeur sans pareille ;
Mais, Madame, je sais ce que je vous conseille,
Et si vous me croyez, quels que soient mes avis,
Vous vous trouverez bien de les avoir suivis.