Ne vaudroit-il pas mieux qu’à quelqu’une de nous
Quand Circé d’un Amant a juré la disgrâce,
Elle cédât les vœux dont l’offre l’embarrasse ?
Pour moi, je verrois sans courroux,
Si dans son cœur Mélicerte s’efface,
Qu’il me vînt faire les yeux doux,
Et je sens je ne sais quel mouvement jaloux
De ce qu’un autre Objet le rend pour moi de glace.
Ainsi, ma Soeur, vous croyez bonnement,
S’il pouvoit à Circé devenir infidèle,
Que vous l’engageriez à quelque attachement ?
Et ne suis-je pas assez belle
Pour mériter son radoucissement ?
Pour moi, je vous admire, et ne vois pas comment
Écouter des douceurs peut donner tant de joie.
C’est bien du temps perdu que celui qui s’emploie
À tourner sur le tendre un fade sentiment,
Et je ne sache rien…
Ma Sœur, c’est vainement
Que votre pruderie avec nous se déploie.
À quoi bon ce déguisement,
Vous décriez l’Amour, et pensez autrement,
Car enfin votre cœur est fait comme le nôtre ;
Et s’il vous venoit un Amant,
Vous le prendriez comme une autre.
En voici pour nous à choisir.
Trois satyres ici viennent pour nous surprendre.
Comme sans nul péril nous pouvons les entendre,
Il faut s’en donner le plaisir.
Vous n’en craignez point l’insolence ?