Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/541

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Mais, par mille accidens en chemin arrêté…

Bradamante.

Je saurai de Léon confondre la fierté ;
Et le prix qu’il aura de son injuste flamme,
Sera de succomber sous la main d’une femme.

Roger.

Ne le dédaignez point ; sur des morts entassés
J’ai vû les plus hardis par son bras terrassés.
Malgré tous leurs efforts sa valeur triomphante…

Bradamante.

Personne jusqu’ici n’a vaincu Bradamante,
Et contre cent Guerriers, d’assez nobles combats
Ont fait voir ce que peut la force de mon bras.
Ma foi donnée à celui-ci m’engage,
Et de mon ennemi quel que soit le courage
Je redouterai peu ses plus terribles coups,
Lors que je défendrai ce qui doit être à vous.
Comme je vous aurai pour témoin de ma gloire,
En vain il me voudra disputer la victoire.

Roger.

Et ne se peut-il pas…

Bradamante.

Et ne se peut-il pas…Et si l’on est vainqueur,
J’y consens, plaignez-vous d’un infidéle cœur.
Dites que me laissant flatter d’un diadême…

Roger.

Vous vaincrez, je le sai, mais enfin je vous aime ;
Et quoi que rien pour vous ne me doive troubler,
Je ne pourrai vous voir combattre sans trembler.
Ma raison aura beau repousser mes alarmes,
C’est toujours s’exposer que de prendre les armes.
Je vois le fier Léon charmé de vos appas ;
Pour ne vous point céder que n’osera-t-il pas ?
Quels efforts !

Bradamante.

Quels efforts !Ses efforts feront voir, à sa honte,
Qu’il n’est rien que pour vous mon amour ne surmonte ;