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Page:Tachard - Voyage de Siam, des Pères jésuites, 1686.djvu/118

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VOYAGE

mais il y en a pourtant beaucoup, & je n’ay pas de peine à le croire à cauſe du grand nombre de peaux de ces animaux dont on fait trafic au Cap, ils ne s’arrêtent pas tellement dans les Bois qu’ils ne viennent quelquefois juſques dans les Terres habitées, où ils attaquent tout ce qu’ils rencontrent & même les hommes. Il en arriva un exemple pendant le tems que nous y fûmes. Ce fut Monſieur le Commiſſaire Général qui nous le conta. Deux hommes ſe promenant loin des habitations, aperçurent un Tigre. L’un tira deſſus & le manqua, aussitôt le Tigre se lançant sur luy le terraſſa : l’autre voyant l’extrême danger de ſon camarade, tira ſur le Tigre & bleſſa ſon camarade à la cuiſſe ; cependant le Tigre ſans être bleſſé, quitta sa proye pour courir sur celuy cy ; le prémier s’étant relevé, vint à tems pour ſecourir ſon amy, & tua le Tigre. On dit que ces Animaux ont cet inſtinct d’aller attaquer entre cent personnes celuy qui a tiré sur eux, & de laisser tous les autres pour s’attacher uniquement à luy. Un mois auparavant il arriva un accident preſque semblable d’un Lion, qui déchira un homme avec ſon Valet, aſſez prés des Habitations, & qui fut tué luy-même enſuite.