Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/537

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honorable, fut mis en prison par le préfet de cavalerie Mennius Rufinus, qui occupait cette ville ; mais ses fers furent aussitôt brisés, grâce à l’intervention d’Hormus, affranchi de Vespasien : cet homme comptait aussi parmi les chefs.

9. Ancienne ville, qui s’écrivait aussi Atria, et que l’on croyait fondée par une colonie étrusque. C’est aujourd’hui Adria, dans la Polésine de Rovigo, au pays de Venise. La mer Adriatique a pris son nom de cette ville, dont elle baignait autrefois les murs.

Cécina change de camp

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Quand la défection de la flotte fut connue, Cécina, pour trouver dans le camp la solitude qu’il cherchait, commanda aux troupes un service qui les tint dispersées, et réunit sur la place d’armes les principaux centurions et un petit nombre de soldats. Là il exalte le courage de Vespasien et la force de son parti ; puis il montre la flotte révoltée, les vivres manquant, l’esprit hostile des Gaules et de l’Espagne, le peu de fond qu’on doit faire sur Rome ; et il parle de Vitellius en termes qui sont autant de satires. Ensuite il fait prêter serment au nouvel empereur : toux qui étaient dans le secret commencèrent ; les autres suivirent, étourdis par la surprise. A l’instant les images de Vitellius sont arrachées, et des courriers partent pour instruire Antonius de ces événements. Mais sitôt que la trahison fut divulguée dans le camp, et que le soldat, revenant en hâte à la place d’armes, aperçut le nom de Vespasien écrit sur les enseignes et les images de Vitellius jetées dans la poussière, ce fut d’abord un vaste silence ; bientôt tout éclate à la fois : "Voilà donc où était retombée la gloire de l’armée de Germanie ! livrer sans combat, sans blessures, ses bras enchaînés et ses armes prisonnières ! Et quels ennemis avait-on devant soi ? des légions vaincues ; encore l’unique force de l’armée othonienne, la première et la quatorzième étaient-elles absentes. Et celles-là aussi, ne les avait-on pas battues et mises en fuite dans ces mêmes plaines c’était sans doute pour que tant de milliers d’hommes armés fussent donnés en présent, comme un troupeau d’esclaves, au banni Antonius ! Ainsi donc huit légions se mettraient à la suite de quelques gens de mer ! Il avait plu à Cécina, il avait plu à Bassus, après avoir ravi au prince palais, jardins, trésors, de ravir à la fin le prince aux soldats. En vain ils apportaient aux Flaviens des forces intactes et un sang non épuisé : méprisables même pour ces nouveaux alliés, que diraient-ils à ceux qui leur demanderaient compte ou de leurs victoires ou de leurs défaites ? "

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Ainsi exhalait son indignation et chaque homme en particulier et toute l’armée ensemble. Au signal donné par la cinquième légion, les images de Vitellius sont replacées et Cécina mis aux fers. Les troupes choisissent pour chefs Fabius Fabullus, commandant de la cinquième légion, et Cassius