Page:Tacite - Oeuvres complètes, trad Panckoucke, 1833.djvu/219

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aux rebelles, et ainsi laissa derrière lui une occasion de soulèvement.

XV. En effet, l’absence du gouverneur éloignant toute crainte, les Bretons discourent entre eux sur les maux de la servitude, se rappellent les uns aux autres leurs outrages, et les aigrissent encore par l’interprétation : « La patience ne mène à rien, se disent-ils, qu’à faire subir un joug plus pesant à ceux qui semblent ainsi le supporter avec facilité. Jadis nous n’avions qu’un roi, maintenant deux nous sont imposés, un gouverneur avide de notre sang, un procurateur avide de nos biens : dans notre soumission, l’accord de ces maîtres et leur discorde sont également funestes. Les satellites de l’un, les centurions de l’autre, mêlent la violence aux outrages. Déjà rien n’échappe à la cupidité, rien à la brutalité. Dans les combats, les dépouilles sont le prix des plus braves ; maintenant, des lâches, des poltrons, enlèvent nos demeures, ravissent nos enfants, imposent des levées, comme si c’était pour la patrie seulement que nous ne sussions pas mourir. Car combien de soldats ont passé sur ces bords, si les Bretons se comptent eux-mêmes ! Ainsi la Germanie, défendue par un fleuve, non par l’Océan, a secoué le joug. Pour nous, patrie, épouses, pères, mères ; pour eux, avarice et luxure sont des causes de guerre ! Ils fuiront comme a fui leur divin Jules, pour peu que nous imitions les vertus de nos ancêtres. Ne nous effrayons pas de l’issue d’un ou de deux combats : plus de résolution, plus de constance appartient aux malheureux. Déjà les dieux mêmes ont compassion de nous : les dieux, qui éloignent le général romain, qui retiennent