Page:Tacite - Oeuvres complètes, trad Panckoucke, 1833.djvu/365

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demment par les exemples donnés, comment par degrés l’éloquence a été morcelée et rapetissée. Hâte-toi plutôt, interrompit Maternus, de remplir ta promesse ; car nous ne voulons pas conclure que les anciens étaient plus habiles, ce qui, pour moi, est bien démontré ; niais nous en recherchons les causes, dont tu t’es souvent occupé, comme tu l’as dit tout-à-l’heure, plus doux et non encore irrité contre l’éloquence de nos temps, avant qu’Aper ne t’offensât par ses attaques contre tes aînés. Je ne suis point offensé, dit Messalla, de l’opposition d’Aper ; mais 11e vous offensez pas non plus si par hasard je blesse vos oreilles, puisque vous savez que la loi de ces discussions est d’exprimer le jugement de son esprit sans heurter l’affection. Continue, dit Maternus, et, puisque tu parles des anciens, use de cette liberté antique dont nous avons encore plus dégénéré que de l’éloquence.

XXVIII. Alors Messalla : Les causes que tu recherches, Maternus, ne sont pas introuvables ; elles ne sont inconnues, ni à toi, ni à Secundus, ni à Aper, quoique vous m’ayez assigné le rôle d’émettre ici ce que nous pensons tous également. Qui ignore en effet que l’éloquence et les autres arts sont déchus de leur gloire antique, non par le manque d’hommes capables, mais par la nonchalance de la jeunesse, la négligence des parens, l’ignorance des instituteurs, et l’oubli des mœurs antiques ? maux qui, nés d’abord dans Rome, bientôt répandus à travers l’Italie, déjà se glissent dans nos provinces. Quoique nos mœurs vous soient les plus connues, je vous parlerai de Rome et de ces vices propres et domestiques qui nous saisissent à peine nés, et s’aggravent à chaque