Page:Tacite - Oeuvres complètes, trad Panckoucke, 1833.djvu/367

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

degré de notre âge. Auparavant je dirai en peu de mots la sévérité et la discipline de nos aïeux pour élever et former les enfans. Et d’abord, chaque Romain gardait près de lui son fils, qui, né d’une mère chaste, croissait, non pas dans le réduit d’une nourrice à gages, mais au giron et au sein de sa mère, dont toute la gloire était l’entretien de sa maison et le soin de ses enfans. On choisissait aussi une parente d’un Age plus mûr : c’est à ses mœurs pures et exemplaires qu’étaient confiés tous les rejetons d’une même famille, et, devant elle, il n’était jamais permis de rien dire qui parût honteux, de rien faire qui semblât peu honorable ; et ce n’était pas seulement les études et les occupations des enfans, mais leurs jeux et leurs délassemens qu’elle tempérait par une certaine pureté, par une certaine retenue. Nous apprenons qu’ainsi Cornelia, mère des Gracques, Aurelia, mère de César. Attia, mère d’Auguste, présidèrent à leur éducation, et produisirent ainsi des hommes supérieurs. Il résultait de cette discipline et de cette sévérité que ces naturels francs, purs, qu’aucun vice n’avait détournés, se livraient aussitôt, et de tout cœur, aux arts honnêtes ; et soit qu’ils inclinassent vers l’art militaire, ou vers la science du droit, ou vers l’étude de l’éloquence, ils s’y portaient exclusivement, et en pénétraient à fond toutes les sources.

XXIX. Mais aujourd’hui, l’enfant avant de parler est confié à quelque petite servante grecque à laquelle on adjoint un ou deux esclaves pris sans choix, souvent même le plus vil et le moins propre à aucun devoir sérieux. C’est de leurs fables et de leurs préjugés qu’est