Page:Tailhade - Quelques fantômes de jadis (1920).djvu/21

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Luxembourg. Il arrivait à midi, s’en retournait à deux heures du matin, emportant sous son bras un litre de rhum pour égayer sa nuit. Il n’avait pas l’ivresse godailleuse et bon enfant de Paul Verlaine. A le voir ainsi, renfermé, taciturne et misanthrope, nul n’aurait soupçonné cet homme de mise correcte et d’abord rechigné, ce bourgeois faisandé en ivrogne, capable d’écrire des vers pleins de fleurs, d’oiseaux, de jeunesse et de clarté, d’aiguiser des épigrammes un peu vieillottes contre les jeunes poètes qui préféraient ne boire que de l’eau.

Verlaine, quant à lui, ne goûtait qu’à l’hôpital ce chaste breuvage. C’était un vieil enfant, jamais sevré du « flot sans honneur » qui emporta Musset, Edgard Poe et tant d’autres ! Il s’éloignait déjà de la quarantaine.

C’était aussi un pénitent saugrenu, Tannhâuser de caboulot, que la Grâce avait touché, sans que jamais l’on sût pourquoi.

Sagesse venait de paraître chez l’éditeur Palmé, ce qui n’empêchait en aucune façon le poète d’écrire Parallèlement et le reste.