Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/129

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est bien loin d’imiter la nature comme sa cadette : elle peut bien décrire et chanter tout ce qui intéresse les hommes ; la peinture seule le fait voir ; avec elle, le sordide intérêt, la tyrannie ne peuvent nous séparer des objets de notre amour ; malgré l’immensité des mers, malgré les verrous et les geôliers affreux, nous voyons encore les traits d’une épouse, d’une amante adorée ; nos larmes, nos baisers peuvent en couvrir l’image ; la mort même ne peut nous ravir tout-à-fait les êtres qui nous sont chers. Une mère qui vient de perdre son fils, dans les transports de sa douleur, ne s’adresse point à la poésie afin qu’elle le chante ; ah ! son cœur le chante mille fois mieux : elle court, les yeux en pleurs, se jeter aux pieds de la peinture ; elle lui demande le fils qu’elle a perdu, et souvent la peinture le lui fait voir encore.

Il est aisé d’imaginer que Van Dyck, avec un aussi rare talent pour un genre si intéressant, dût être bien chéri, bien fêté des hommes qui avoient besoin de lui. Il acquit, en effet, beaucoup de richesses, de considération et de réputation : mais, comme la fortune fait toujours acheter ses faveurs, il mourut à quarante-deux ans, épuisé par ses