Je m’ay vollu amy clamer,
Requerant graces et mercis,
Dont j’ay esté peu enrichis
Des dames comme fin amant,
Et pour ce fait, par saint Nicaise,
De ceste heure a Dieu les comant.
Je ne veul amer qu’a mon aise.
Prince, je vous en diray tant :
Qui veult, se s’en courche ou repaise,
Comment qu’il soit d’ore en avant.
Je ne veul amer qu’a mon aise.
Ainsi comme fist Orpheüs
Jadis, maint amans ne font mie ;
Le portier d’Enfer, Cerberus,
Endormy a sa chalemie.
Et reve Erudice s’amie,
Que nuit et jour il acclamoit
En pleurs comme amant qui larmie,
Pour ce que loyaulment l’amoit.
Tous les dyables furent deceuz
Quant ilz oÿrent l’armonie
D’Orpheüs, qui contre et dessus
Jouoit par tresgrant melodie.
Que voullez vous que je vous dye ?
S’amie que il requeroit
Luy rendirent a ceste fie,
Pour ce que loyaulment l’amoit.
Que dirons nous de Narcisus,
Qui sa char ot en bois nourrie ?
On ne puet dire, par Jhesus,
Qu’amours a sur tous seignourie,
Car Echo, la dame jolie,
Se mist, qui honte ne cremoit,
De Narcisus en la baillie,
Pour ce que loyaulment l’amoit.
Prince, une dame qui salie
Si avant, faire ne le doit.
Mais elle fist, c’estoit folie,
Pour ce que loyaulment l’amoit.
Orpheüs jadiz se party,
Et s’amie requerre alla
En Enfer, mais il la perdy
Tost aprez, on scet bien cela.
Et que vault amer cha et la,
Et puis perdre de sy legier,
Ainsy qu’une chose soudaine
S’amie ? C’est pour enragier !
Je n’en puis [plus] prendre la paine !
Et Narcisus, en tel party,
En son temps d’amours abusa,
Car d’orgueil fut sy bien party
Que l’amour Equo refusa.
Mais amours en droit en usa,
Car pour amer le fist noyer
Aprez son umbre en la fontaine.
Ainsi amer fait annoyer.
Je n’en puis plus prendre la paine !
Jamais sans paine et sans soussy
Ne sont amans, — c’est de pieça, —
Ne sans merancolie aussy ;
Car les ungz vont puis cha puis la
Pour ung regard qu’on leur lancha,
Et les autres pour ung baisier
Se mettent a la grosse alaine.
Celles amours sont a laissier :
Je n’en puis plus prendre la paine !
Prince, pour l’amour du dangier
Qui est en amours, nerf ne vaine
N’ay quy y tendra, au vray jugier.
Je n’en puis plus prendre la paine !
Amours a partout grant vertu,
Et par sus toutes gens domine.