Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/247

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nui ou plutôt accepte les sensations ternes bien plus aisément qu’un Français.

Selon lui, la France est supérieure à l’Allemagne pour l’aptitude à la société : non seulement elle a l’instinct, le tact, le talent de la conversation et du monde, par le besoin de causer, la politesse, le désir de briller, l’art de la toilette, la facilité de l’épanchement, la promptitude à passer d’une idée à une autre, d’un sujet à un autre, etc. ; mais elle a encore l’esprit public, la faculté de sentir à l’unisson, de faire masse et corps sur une question donnée, avec exécution immédiate. — Par exemple, nette direction de cet esprit public en 1788 et en 1829, en juin 1848, en décembre 1852, etc. Le parti est pris, parce que les idées sont peu nombreuses, simples, claires, contagieuses ; tandis que l’Allemand, individualiste, flotte isolé, chaque individualité étant différente des autres et difficile à ébranler. — La France a plus de traditions, un code de politesse, d’honneur, de savoir-vivre ; chaque individu, comme la masse, a un jugement moral tout fait, capable de s’appliquer aux principales occurrences et de lui