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Page:Taine - Essais de critique et d’histoire, 1866.djvu/260

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3SS M. MICHELET. mots nobles, les roulades, les coups de voix, les trilles, les arpèges de son ramage^ bon obserrateur, analyste attentif, définissant toutes les opérations de ce gosier, n’apercevant que la partie extérieure de l’hymne. Ce que M. Michelet en aperçoit, c’est la source intérieure, c’est la passion musicale, c*eit rame créatrice. « Le rossignol voit les bois, Tolget aimé qui les transfigure ; il voit sa vivacité tendre, et mille grâces de la vie ailée, que la nôtre ne peut rendre. Il lui parle, elle lui répond ; il se charR6 de deux rôles, à la grande voix mâle et sonore, iré- plique par de doux petits cris. Quoi encore ! Je ne fais nul doute que déjà ne lui apparaisse le ravis- sement de sa vie , la tendre intimité du nid , la pauvre petite maison qui aurait été son ciel.... Rapprochez-vous, c’est un amant ; mais éloignez- vous, c’est un dieu. La mélodie, ici vibrante et d’un brûlant appel aux sens, là-bas grandit et s’-amplifîe par les effets de la brise ; c’est un- chant religieux qui emplit toute la forêt. De près, il s’agissait du nid, de l’amante, du fils qui doit nattre ; mais de loin, autre est cette amante, autre est le fils : c’est la Nature, mère et fille, amante éternelle qui se chante et se célèbre ; c’est l’infini de l’amour qui aime en tous et chante en tous ; ce sont les atten- drissements, les cantiques, les remerctments qui s’échangent de la terre au ciel. » Voilà le pan- théisme profond, passionné, mystique, où aboutit