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LA RÉVOLUTION


sitôt qu’il met le pied en Normandie, il est investi et l’on place une sentinelle à sa porte. — L’intendant de Besançon est en fuite ; celui de Rouen voit sa maison saccagée de fond en comble et se sauve parmi les cris d’une bande qui demande sa tête. — À Rennes, le doyen du parlement est arrêté, maltraité, gardé à vue dans sa chambre, puis renvoyé de la ville, quoique malade, et sous escorte. — À Strasbourg « trente-six maisons de magistrats sont marquées pour le pillage[1] ». — À Besançon, le président du parlement est contraint d’élargir les mutins arrêtés dans une précédente émeute et de brûler publiquement toute la procédure. — En Alsace, dès les premiers troubles, les prévôts ont été forcés de fuir, les baillis et juges seigneuriaux se sont cachés, les inspecteurs des forêts se sont sauvés, on a démoli les habitations des gardes : tel, homme de soixante ans, a été excédé de coups, on l’a promené dans le village en lui arrachant les cheveux ; de sa maison, il ne reste que les murs et une portion de la toiture ; tous ses meubles ou effets ont été brisés, brûlés ou volés ; on l’a forcé à signer avec sa femme un acte par lequel il s’engage à restituer toutes les amendes qu’il a prononcées, et donne quittance de tous les dégâts qu’il vient de subir. — En Franche-Comté, les bailliages

  1. M. de Rochambeau, Mémoires, I, 253 (18 juillet). — Sauzay, Histoire de la persécution révolutionnaire dans le département du Doubs, I, 128 (19 juillet). — Archives nationales, F7, 3253 (lettre des députés de la commission provinciale d’Alsace, 8 septembre). D, XXIX, I, note de M. de la Tour-du-Pin, 28 octobre 1789. — Lettre de M. de Langeron, 3 septembre ; de Breitmann, garde-marteau, Val-Saint-Amarin (Haute-Alsace), 26 juillet.