nement qui lui plaît, mais non celle dont il a besoin ;
il ne le saura qu’à l’usage : il lui faut du
temps pour vérifier si sa maison politique est commode,
solide, capable de résister aux intempéries,
appropriée à ses mœurs, à ses occupations, à son
caractère, à ses singularités, à ses brusqueries. Or,
à l’épreuve, nous n’avons jamais été contents de la
nôtre : treize fois en quatre-vingts ans, nous l’avons
démolie pour la refaire, et nous avons eu beau la
refaire, nous n’avons pas encore trouvé celle qui
nous convient. Si d’autres peuples ont été plus heureux,
si, à l’étranger, plusieurs habitations politiques
sont solides et subsistent indéfiniment, c’est qu’elles
ont été construites d’une façon particulière, autour
d’un noyau primitif et massif, en s’appuyant sur
quelque vieil édifice central plusieurs fois raccommodé,
mais toujours conservé, élargi par degrés,
approprié par tâtonnements et rallonges aux besoins
des habitants. Nulle d’entre elles n’a été bâtie
d’un seul coup, sur un patron neuf, et d’après les
seules mesures de la raison. Peut-être faut-il admettre
qu’il n’y a pas d’autre moyen de construire à
demeure, et que l’invention subite d’une constitu-
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iii
PRÉFACE.