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LE RÉGIME MODERNE


doit être laïque et jacobine, « presque partout[1] » l’instituteur est un laïque de rebut, un jacobin déchu, un ancien clubiste famélique et sans place, mal embouché et mal famé. Naturellement, les familles refusent de lui confier leurs enfants ; même honorable, elles se détournent de lui : c’est qu’en 1800 jacobin et vaurien sont devenus deux mots synonymes. Désormais les parents veulent que leurs enfants apprennent à lire dans le catéchisme,

    aidaient d’ailleurs, presque partout, à former un traitement avantageux à l’instituteur, en sorte que ces fonctions étaient recherchées et communément bien remplies… La plupart des villages avaient pour institutrices des sœurs de Saint-Vincent-de-Paul ou d’autres, connues sous le nom de Vatelottes. — Le partage des biens communaux et la vente de ceux qui étaient assignés aux anciennes fondations ont privé les communes des ressources qui fournissaient un salaire honnête aux maîtres et maîtresses d’école ; le produit des centimes additionnels suffit à peine aux dépenses administratives. — Aussi n’y a-t-il plus guère maintenant que des personnes sans moyens qui prennent un état trop mal rétribué ; encore négligent-ils leurs écoles, dès qu’il se présente toute autre occasion de gagner quelque chose. » — Archives nationales, n° 1004, cartons 3144 et 3145 (Rapports des conseillers d’État en mission dans l’an IX). 1re  division militaire, Rapport de Lacuée. Aisne : « Il n’y a point maintenant d’école primaire suivant l’institution légale. » — Même situation dans l’Oise, et dans la Seine pour les arrondissements de Sceaux et Saint-Denis.

  1. Albert Duruy, 178 (Rapport rédigé par les bureaux du ministère de l’intérieur, an VIII) : « Détestable choix de ceux qu’on a appelés des instituteurs : ce sont presque partout des hommes sans mœurs, sans instruction, qui ne doivent leur nomination qu’à un prétendu civisme, qui n’est que l’oubli de toute moralité et de toute bienséance… Ils affectent un mépris insolent pour les (anciennes) opinions religieuses. » — Ib., 497 Procès-verbaux des Conseils généraux). Sur les instituteurs primaires, Hérault : « La plupart ineptes et sans aveu. » — Pas-de-Calais : « La plupart ineptes ou immoraux. »