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LA PROPAGATION DE LA DOCTRINE


« aristocratie qui couvre toutes les parties de la France, qui, par ses membres, atteint à tout, et exerce partout ce qu’il y a d’essentiel dans toutes les parties de la puissance publique ? » — Mettons fin « à ce crime social, à ce long parricide qu’une classe s’honore de commettre journellement contre les autres… Ne demandez plus quelle place enfin les privilégiés doivent occuper dans l’ordre social ; c’est demander quelle place on veut assigner dans le corps d’un malade à l’humeur maligne qui le mine et le tourmente,… à la maladie affreuse qui dévore sa chair vive ». — La conséquence sort d’elle-même : extirpons l’ulcère, ou tout au moins balayons la vermine. Le Tiers, à lui seul et par lui-même, est « une nation complète », à qui ne manque aucun organe, qui n’a besoin d’aucune aide pour subsister ou se conduire, et qui recouvrera la santé lorsqu’il aura secoué les parasites incrustés dans sa peau.

« Qu’est-ce que le Tiers ? Tout. Qu’a-t-il été jusqu’à présent dans l’ordre politique[1] ? Rien. Que demande-t-il ? À y devenir quelque chose. » — Non pas quelque chose, mais tout. Son ambition politique est aussi grande que son ambition sociale, et il aspire à l’autorité aussi bien qu’à l’égalité. Si les privilèges sont mauvais, celui

  1. « La noblesse, disent les nobles, est un intermédiaire entre le roi et le peuple. — Oui, comme le chien de chasse est un intermédiaire entre le chasseur et les lièvres. » (Chamfort.)