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L’ANCIEN RÉGIME


de collecteur qui ne marche par force et ne reçoive chaque année[1] « huit ou dix commandements ». Parfois on le met en prison aux frais de la paroisse. Parfois on procéde contre lui et contre les contribuables « par établissement de garnisons, saisies, saisies-arrêts, saisies-exécutions, et ventes de meubles ». — « Dans la seule élection de Villefranche, dit l’assemblée provinciale de la Haute-Guyenne, on compte cent six porteurs de contraintes et autres recors toujours en chemin. »

La chose est passée en usage, et la paroisse a beau pâtir, elle pâtirait davantage si elle faisait autrement. Près d’Aurillac, dit le marquis de Mirabeau[2], il y a de l’industrie, du labeur, de l’économie, et, sans cela, rien que misère et pauvreté. Cela fait un peuple mi-parti d’insolvables et de riches honteux qui font les pauvres, crainte de surcharge. La taille une fois assise, tout le monde gémit, se plaint, et personne ne paye. Le terme expiré, à l’heure et à la minute, la contrainte marche, et les collecteurs, quoique aisés, se gardent bien de la renvoyer en la payant, quoique, au fond, cette garnison soit fort chère. Mais ces sortes de frais sont d’habitude, et ils y comptent, au lieu qu’ils craignent, s’ils devenaient plus exacts, d’être plus chargés l’année d’ensuite. » En effet, le receveur, qui paye ses garnisaires un franc par jour, les fait payer

  1. Traité de la population, 2e partie, 26.
  2. Archives nationales, H. 1417. (Lettre de M. de Cypierre, intendant d’Orléans, 17 avril 1765.)