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Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 3, 1909.djvu/263

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L’ASSEMBLÉE CONSTITUANTE ET SON ŒUVRE


« leur vie abandonné leurs foyers domestiques », deviennent les parias de leur canton. Dès 1789, ils commencent à sentir que pour eux la place n’est plus tenable[1]. — « Il est absolument contraire aux droits de l’homme, dit une lettre de Franche-Comté, de se voir perpétuellement dans le cas d’être égorgé par des scélérats qui confondent toute la journée la liberté avec la licence. » — « Je ne connais rien d’aussi fatigant, dit une lettre de Champagne, que l’inquiétude sur la propriété et la sûreté ; jamais elle ne fut mieux fondée ; car il ne faut qu’un moment pour mettre en mouvement une populace indocile qui se croit tout permis et qu’on entretient soigneusement dans cette erreur. » — « Après les sacrifices que nous avons faits, dit une lettre de Bourgogne, nous ne devions pas nous attendre à de pareils traitements ; je pensais au contraire que nos propriétés seraient les dernières violées, parce que le peuple nous saurait quelque gré de rester dans notre

  1. Archives nationales, H, 784. Lettres de M. de Langeron, 16 et 18 octobre 1789. — Albert Babeau, Histoire de Troyes, lettres adressées au chevalier de Poterat, juillet 1790. — Archives nationales, papiers du Comité des Rapports, liasse 4, lettre de III. Le Belin-Chatellenot au président de l’Assemblée nationale, 1er juillet 1791. — Mercure, n° du 15 octobre 1791. Article de Mallet du Pan : « Tel est le langage littéral que m’ont tenu ces émigrants, je n’y ajoute pas une ligne. » — Ib., n° du 15 mai 1790, lettre du baron de Bois-d’Aisy, du 29 avril 1790, demandant un décret de protection pour les nobles : « Nous saurons (alors) si nous sommes proscrits, ou si nous sommes pour quelque chose dans les Droits de l’homme écrits avec tant de sang, et s’il ne nous reste enfin d’autre ressource que celle d’aller porter sous un autre ciel le reste de nos propriétés et de notre malheureuse existence. »