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L’ASSEMBLÉE CONSTITUANTE ET SON ŒUVRE


refusent le serment requis, électeurs, officiers municipaux, juges, administrateurs, sont déchus de leur droit de vote, révoqués de leurs fonctions et déclarés incapables de tout office public[1]. Par suite, les catholiques scrupuleux sont exclus des administrations, des élections, et particulièrement des élections ecclésiastiques ; d’où il suit que plus on est croyant, moins on a de part au choix de son prêtre[2]. — Admirable loi qui, sous prétexte de réformer les abus ecclésiastiques ou laïques, met tous les fidèles, ecclésiastiques ou laïques, hors la loi.

Dès les premiers jours, la chose devient manifeste. Cent trente-quatre archevêques, évêques, coadjuteurs refusent le serment ; on n’en trouve que quatre pour le prêter, dont trois, MM. de Talleyrand, de Jarente, de Brienne, incrédules et connus par leurs mauvaises mœurs : le reste à résisté par conscience, et surtout par esprit de corps ou par point d’honneur. Autour de cet état-major, le plus grand nombre des curés se rallient. Dans le diocèse de Besançon[3], sur quatorze cents prêtres, trois cent trente font le serment, mille le refusent, quatre-vingts le rétractent. Dans le département du Doubs,

  1. Archives nationales, F7, 3235, lettre de M. de Châteauneuf-Randon, député de la Lozère, 28 mai 1791. Après le décret du 23 mai, tous les fonctionnaires du département ont donné leur démission.
  2. Duvergier, loi du 21-29 mai 1791.
  3. Sauzay, I, 366, 538 à 593, 750. — Archives nationales, F7, 3235, lettre de M. de Châteauneuf-Randon, 10 mai 1791. — Mercure, nos du 16 avril et du 22 avril 1791. Articles de Mallet du Pan. Lettre de Bordeaux du 20 mars 1791.