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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


de clameurs et de violences, on contraint les vendeurs à baisser leurs prix d’un tiers et davantage. Impossible aux administrations de maintenir dans leur halle la liberté de l’achat et de la vente. Le peuple a d’avance écarté la troupe de ligne : quelle que soit la tolérance ou la connivence des soldats, il sent vaguement qu’ils ne sont pas là pour laisser éventrer les sacs ou prendre les fermiers à la gorge ; afin de se débarrasser de toute entrave ou surveillance, il emploie la municipalité elle-même, et la force à se désarmer de ses propres mains. — Assiégés dans la maison commune, parfois sous les pistolets et les baïonnettes[1], les officiers municipaux expédient au détachement qu’ils attendaient l’ordre de s’en retourner, et supplient le directoire de ne plus leur envoyer de troupes ; car, s’il en vient, on leur a déclaré « qu’ils auraient à s’en repentir ». Point de troupes : à Étampes le peuple répète « qu’elles sont demandées et payées par les marchands de farine » ; à Montlhéry, « qu’elles ne servent qu’à armer les citoyens les uns contre les autres » ; à Limours, « qu’elles feront renchérir les grains ». Sur cet article, tous les prétextes semblent bons ; la volonté populaire est absolue,

  1. Archives nationalesF7, 3268 et 3269, passim. Délibération du directoire de Seine-et-Oise, 20 septembre 1791 (à propos de l’insurrection du 16 septembre à Étampes). — Lettre de Charpentier, président du district, 19 septembre. — Rapport des commissaires du département, 11 mars 1792 (sur l’insurrection de Brunoy du 4 mars). — Rapport des commissaires du département, 4 mars 1792 (sur les insurrections de Montlhéry des 13 et 20 février). — Délibération du directoire de Seine-et-Oise, 16 septembre 1791 (sur l’insurrection de Corbeil). — Lettres des maires de Limours, de Lonjumeau, etc.