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LA RÉVOLUTION


« des vieillards, verront leurs héritages devenir la proie des gaspillages nationaux ! Quoi ! Mme Guillin, qui a dû fuir avec horreur la terre où des monstres ont brûlé sa demeure, égorgé et mangé son mari, et vivent impunément à côté de son domicile, Mme Guillin verra sa fortune confisquée au profit des communautés auxquelles elle doit ses épouvantables infortunes ! M. de Clarac ira, sous peine du même châtiment, relever les ruines de son château où une armée de scélérats n’a pu parvenir à l’étouffer ! » — Tant pis pour eux s’ils n’osent rentrer. Ils vont être frappés de mort civile, bannis à perpétuité, et, s’ils rompent leur ban, livrés à la guillotine, avec eux d’autres qui, encore plus innocemment, ont quitté le territoire, magistrats, simples riches, bourgeois ou paysans catholiques et notamment une classe entière, le clergé insermenté, depuis l’archevêque-cardinal jusqu’au simple vicaire de village, tous poursuivis, puis écrasés par la même oppression populaire et par la même oppression législative, chacune des deux persécutions provoquant et aggravant l’autre, tant qu’enfin la populace et la loi, complices l’une de l’autre, ne laissent plus ni un toit, ni un morceau de pain, ni une heure de vie sauve à un gentilhomme ou à un curé.

VIII

C’est que la passion régnante s’en prend à tous les obstacles, même à ceux qu’elle a mis elle-même en travers de son chemin. Par une usurpation énorme, la mino-