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LA RÉVOLUTION


des jacobins et de la plèbe, par suite la conquête, l’expropriation, l’extermination, dans le Gard un fourmillement de gardes nationales qui refont la jacquerie, toute la lie du Comtat qui remonte à la surface et couvre le Vaucluse de son écume, une armée de six mille Marseillais qui s’abat sur Arles. — Dans les districts de Nîmes, Sommières, Uzès, Alais, Jalais, Saint-Hippolyte, les titres de propriété sont brûlés, les propriétaires rançonnés, les officiers municipaux menacés de mort s’ils essayent de s’interposer, vingt châteaux et plus de quarante maisons de campagne dévastés, incendiés, démolis. — Le même mois, Arles et Avignon[1], livrés aux bandes de Marseille et du Comtat, voient approcher les confiscations et les massacres. — Autour du commandant qui a reçu l’ordre d’évacuer Arles[2], « les habitants de tous les partis » accourent en suppliants, « lui serrent les mains, le conjurent, les larmes aux yeux, de ne point les abandonner ; des femmes et des enfants s’attachent à ses bottes », tellement qu’il ne sait comment se dégager sans les blesser ; lui parti, douze cents familles émigrent. Après l’entrée des Marseillais, on voit dix-huit cents électeurs proscrits, leurs maisons de campagne sur les deux rives du Rhône

  1. Archives nationales, F7, 3196 Procès-verbal d’Augier et Fabre, administrateurs des Bouches-du-Rhône, envoyés à Avignon, 11 mai 1792. (La rentrée de Jourdan, de Mainvielle et des assassins de la Glacière avait eu lieu le 29 avril.)
  2. Dampmartin, II, 63. — Portalis, Il est temps de parler (brochure), passim. — Archives nationales, F7, 7090. Mémoire des commissaires de l’administration municipale d’Arles, an IV, 22 nivôse.