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LA PREMIÈRE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


d’hommes et de femmes traversent la salle en poussant des cris politiques. On admet à la barre toutes les parades indécentes, puériles ou séditieuses[1]. Aujourd’hui, ce sont « des citoyennes de Paris » qui demandent à s’exercer aux manœuvres militaires et à prendre pour commandants « des ci-devant gardes-françaises » ; le lendemain, arrivent des enfants qui expriment leur patriotisme « avec une naïveté touchante », et regrettent que « leurs pieds chancelants ne leur permettent pas de marcher, que dis-je ? de voler contre les tyrans » ; ensuite viennent les galériens de Châteauvieux, escortés d’une foule qui vocifère ; une autre fois, les artilleurs de Paris, au nombre de mille, avec leurs tambours ; incessamment des délégués, de la province, des faubourgs, des clubs, avec leurs déclamations furibondes, leurs remontrances impérieuses, leurs exigences, leurs sommations et leurs menaces. — sous ces intermèdes de tapage plus fort, roule un brouhaha continu,

    mort, ou ma femme ! Tel est le cri que m’inspire et que m’inspirera toujours la nature. » — Le pétitionnaire reçoit les honneurs de la séance. Ib., XII, 369.)

  1. Parfois le grotesque est celui d’une farce : « M. Piorry, au nom de citoyens pauvres mais vertueux, dépose deux paires de boucles avec cette devise : « Elles ont servi à contenir les tirants de mes souliers sur mes pieds ; elles serviront à réduire sous eux, avec l’empreinte et le caractère de la vérité, tous les tyrans ligués contre la Constitution. » (Moniteur, XII, 457, séance du 21 mai.) — Ib., XIII, 249, séance du 25 juillet : « Une jeune citoyenne offre de combattre en personne contre les ennemis de la patrie », et le président lui répond d’un air galant : « Plus faite pour adoucir les tyrans que pour les combattre, vous offrez, » etc.


  la révolution. iii.
T. V. — 9