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LA RÉVOLUTION


menacée comme elle par la propagande révolutionnaire[1]. À force de sonner le tocsin, les Jacobins, maîtres de l’Assemblée, ont réussi à conclure « cette alliance monstrueuse », et, de jour en jour, leur tocsin sonne plus fort. Encore un an, grâce à cette politique, la France aura l’Europe entière pour ennemie, et pour unique amie la régence d’Alger, dont le régime intérieur est à peu près le même que le sien.

IV

À travers leurs carmagnoles perce un calcul qu’ils avoueront plus tard. — « On nous opposait toujours la Constitution ; dira Brissot, et la Constitution ne pouvait tomber que par la guerre[2]. » Ainsi les griefs diploma-

  1. Albert Sorel, la Mission du comte de Ségur à Berlin (publiée dans le Temps du 15 octobre 1878). Dépêche de M. de Ségur à M. de Lessart, du 24 février 1792 : « Le comte de Schulenburg me répéta que ce n’était nullement notre Constitution dont on voulait se mêler. Mais, dit-il avec une vivacité singulière, il faut bien se préserver de la gangrène. La Prusse est peut-être le pays qui devrait le moins la craindre ; cependant, quelque éloigné que soit de nous un membre gangrené, il vaut mieux le couper que de risquer sa vie… Comment voulez-vous que la tranquillité soit maintenue, lorsque, tous les jours, des milliers d’écrivains,… des maires, des gens en place, insultent les rois, publient que la religion chrétienne a toujours soutenu le despotisme et qu’on ne sera libre qu’en la détruisant, qu’il faut exterminer tous les princes, parce que ce sont tous des tyrans ? »
  2. Buchez et Roux, XXV, 203, séance du 3 avril 1793. Discours de Brissot. — Ib., XX, 127. À tous les républicains de France, par Brissot, 4 octobre 1792 : « C’est l’abolition de la royauté que j’avais en vue en faisant déclarer la guerre. » Il cite à ce propos son discours du 30 décembre 1791, où il disait : « Je n’ai