Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 5, 1904.djvu/217

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
213
LA PREMIÈRE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


ceux qui viendront avec lui, entraîne les timides et dénonce le reste à une haute-cour nationale dont il a lui-même désigné tous les membres. Vingt électeurs ainsi dénoncés sont condamnés et proscrits ; Duprat menace d’entrer par force pour les exécuter sur place, et, sous sa conduite, l’armée des Mandrins s’avance contre Avignon. — Arrêtée, puis contenue pendant deux mois par les commissaires médiateurs de la France, licenciée par eux et sur le point d’être dissoute, elle ressaisit par un coup de main sa proie qui lui échappait. Le 21 août 1791, Jourdan, avec son ramassis de coquins, s’empare du Palais ; la municipalité est chassée, le maire se sauve déguisé, le secrétaire Tissot est sabré, quatre officiers municipaux et quarante autres personnes sont jetés en prison, nombre de maisons de fugitifs et de prêtres sont pillées et fournissent aux bandits leur premier acompte[1]. — Alors commence la grande opération fiscale qui va remplir leurs poches. Cinq hommes de paille, choisis par Duprat et consorts, composent, avec Lécuyer comme secrétaire, une municipalité provisoire qui taxe la ville à 300 000 livres et, supprimant les couvents, met en rente la dépouille des églises. Les cloches sont descendues, et, toute la journée, on entend les coups de marteau des ouvriers qui les brisent. Une cassette pleine d’argenterie, de diamants et de croix

  1. Archives nationales, DXXIV, 16-23, n° 3. Récit de ce qui s’est passé hier, 21 août, dans la ville d’Avignon. — Lettres du maire Richard et de deux autres, 21 août. — Lettre au président de l’Assemblée nationale, 22 août (cinq signataires, au nom de 200 familles réfugiées dans l’île de la Bartelasse).