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LA PREMIÈRE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


que, de toutes parts, « les honnêtes gens[1] » s’indignent de voir la Constitution soumise à l’arbitraire de la plus basse plèbe. Presque toutes les administrations supérieures, soixante-quinze directoires de département[2] envoient leur adhésion à la lettre de La Fayette ou répondent par des encouragements à la proclamation si mesurée et si noble par laquelle le roi, exposant les violences qu’on lui a faites, maintient son droit légal avec une triste et inflexible douceur. Nombre de villes, grandes ou petites, le remercient de sa fermeté, et ceux qui signent les adresses sont les notables de l’endroit[3], chevaliers de Saint-Louis, anciens officiers, juges, administrateurs de district, médecins, notaires, avoués, receveurs de l’enregistrement, directeurs de la poste, fabricants, négociants, gens établis, bref les hommes les plus considérés et les plus considérables, À Paris, une pétition semblable, rédigée par deux anciens constituants, recueille 247 pages de signatures certifiées par 99 notaires[4]. Même dans le conseil général de la Commune, il se trouve une majorité pour infliger un blâme public au maire Pétion, au procureur-syndic Manuel, aux administrateurs de police, Panis, Sergent, Vigueret Perron[5].

  1. Expression de La Fayette dans son adresse à l’Assemblée.
  2. La Fayette, Mémoires, I, 452. — Malouet (II, 213) dit 70 directoires.
  3. Cf., par exemple, Archives nationales, AF, H, 116. Pétition de 228 notables de Montargis.
  4. Pétition dite des 20 000, présentée par MM. Guillaume et Dupont de Nemours. — Cf. Mortimer-Ternaux, I, 278. — Selon Buchez et Roux, la pétition ne contenait que 7411 noms.
  5. Mortimer-Ternaux, I, 277.