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LA RÉVOLUTION


faire égorger ». Là-dessus, la Convention ayant décrété le travail à la tâche, les prétendus travailleurs réclament au nom de l’égalité, rappellent qu’ils se sont levés le 10 août, et veulent massacrer les commissaires. On ne vient à bout de les dissoudre que le 2 novembre, en allouant à ceux des départements 3 sous par lieue ; mais il en reste assez à Paris pour grossir outre mesure la troupe des frelons qui, ayant pris l’habitude de consommer le miel des abeilles, se croient en droit d’être payés par le public pour bourdonner à vide sur les affaires de l’État.

Comme arrière-garde, ils ont « toute la canaille des environs de Paris, qui accourt au moindre bruit de tambour, parce qu’elle espère faire un coup lucratif[1] ». — Comme avant-garde, ils ont « les brigands », en première ligne « tous les voleurs que Paris recèle et que la faction a enrôlés dans son parti pour s’en servir au besoin », en seconde ligne « beaucoup d’anciens domestiques, les suppôts de jeu et des maisons de tolérance, toute la classe avilie[2] ». — Naturellement, les femmes perdues en sont. « Citoyennes, dira Henriot aux filles du Palais-Royal qu’il a fait descendre en masse dans le jardin, citoyennes, êtes-vous bonnes républicaines ? — Oui, oui, notre général. — N’auriez-vous pas,

  1. Schmidt, II, 12 (Dutard, 7 juin) : « J’ai vu, ces jours passés, des gens de Neuilly, de Versailles, de Saint-Germain, etc., qui étaient ici à demeure, par l’odeur alléchés. »
  2. Ib., I, 254 (Dutard, 19 mai). — À cette date, les voleurs foisonnent à Paris, et le maire, Chambon, dans son rapport à la Convention, l’avoue lui-même (Moniteur, XV. 67, séance du 5 janvier 1793).