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LA RÉVOLUTION


« eux ; le reste de la France est attaché à la royauté. Il faut faire peur aux royalistes[1] ! » — C’est lui qui, le 28 août, obtient de l’Assemblée la grande visite domiciliaire par laquelle la Commune emplit ses prisons. C’est lui qui, le 2 septembre, pour paralyser la résistance des honnêtes gens, fait décréter la peine de mort contre quiconque, « directement ou indirectement, refusera d’exécuter ou entravera, de quelque manière que ce soit, les ordres donnés et les mesures prises par le pouvoir exécutif ». C’est lui qui, le même jour, annonce au journaliste Prudhomme le prétendu complot des prisons, et, le surlendemain, lui envoie son secrétaire, Camille Desmoulins, pour falsifier le compte rendu des massacres[2]. C’est lui qui, le 3 septembre, au minis-

  1. Robinet, Procès des Dantonistes, 39, 45 (paroles de Danton dans le comité de défense générale). — Mme Roland, Mémoires, II, 30. Le 2 septembre, Grandpré chargé de rendre compte au ministre de l’intérieur de l’état des prisons, attend Danton à l’issue du conseil et lui expose ses alarmes. « Danton, importuné de la représentation, s’écria avec sa voix beuglante et un geste approprié à l’expression : « Je me f… bien des prisonniers ; qu’ils deviennent ce qu’ils pourront. » Et il passa son chemin avec humeur. C’était dans la seconde antichambre, en présence de vingt personnes. » — Arnault, II, 101. À l’époque des massacres de septembre, « Danton, en présence d’un de mes amis, avait répondu à quelqu’un qui le pressait d’user de son autorité pour arrêter l’effusion du sang : « N’est-il pas temps que le peuple ait sa revanche ? »
  2. Prudhomme, Crimes de le Révolution, IV, 90. Le 2 septembre, au bruit du tocsin et du canon d’alarme, Prudhomme va chez Danton pour s’informer. Danton lui raconte la fable convenue et ajoute : « Le peuple, irrité et instruit à temps, veut faire justice lui-même des mauvais sujets qui sont dans les prisons. » — Survient Camille Desmoulins : « Tiens, lui dit Danton, Prudhomme vient me demander ce que l’on va faire. » — « Tu ne lui as