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LA RÉVOLUTION


III

Quand un homme devient esclave, disait le vieil Homère, les dieux lui ôtent la moitié de son âme ; la même chose arrive quand un homme devient tyran. Dans le pavillon de Flore, à côté et au-dessus de la Convention tombée en servitude, les douze rois qu’elle s’est donnés siègent deux fois par jour[1], et lui commandent ainsi qu’à la France[2]. Bien entendu, pour occuper cette place, ils

    le convoi funèbre, pendant que David faisait ce croquis. Mme Jullien écrit dans son journal, le 3 septembre 1792 : « Quand on veut la fin, il faut vouloir les moyens. Point d’humanité barbare. Le peuple est levé, le peuple venge les crimes de trois ans. » — Son fils, sorte de puritain sensible, fut un des agents les plus actifs de Robespierre ; il se souvenait de ses meurtres, comme on le voit par le récit de Michelet, et il baissait les yeux, sachant bien que toute sa philanthropie présente ne pouvait pas anéantir ses actes passés.

  1. Archives nationales, AF II, 46. Registre des arrêtés du Comité de Salut public, t. II, arrêté du 3 août 1793.
  2. Sur la concentration et l’encombrement des affaires, cf. Archives nationales, ib., arrêtés des 4, 5, 6 août 1793, et AF II, 23, arrêtés du 1er et 15 brumaire an II. — Sur la distribution et l’expédition des affaires au Comité et sur les heures de séance, ib., arrêtés des 6 avril, 6, 13, 15, 18 juin, 13 août 1793, 27 germinal an II. — À partir du 3 août, chaque jour il y a deux séances, de 8 heures du matin à 1 heure, et de 7 heures du soir à 10 heures ; à 10 heures, le Conseil exécutif vient délibérer avec le Comité de Salut public, et les signatures sont données vers 2 ou 3 heures du matin. — Les cartons AF II, 23 à 42, contiennent l’histoire intérieure du Comité, les procès-verbaux des séances et de la correspondance. Il n’y a qu’à les lire pour suivre tous les détails de l’initiative et de la responsabilité du Comité, par exemple (4 nivôse an II, lettre à Barras et Fréron, à Marseille) : « Le Comité applaudit aux mesures rigoureuses que vous avez consacrées dans votre arrêté sur Marseille. — Marseille appelle de votre part un