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LA RÉVOLUTION


gouverner « selon les maximes de paix et de justice naturelles. Ces maximes sont bonnes entre amis de la liberté » ; mais entre patriotes et malveillants elles ne sont pas de mise. Ceux-ci sont « hors du souverain », hors de la loi, exclus du pacte social, esclaves révoltés, bons à châtier ou à contraindre, et parmi eux il faut mettre « les indifférents[1] ». — « Vous avez à punir quiconque est passif dans la république et ne fait rien pour elle ; » car son inertie est une trahison et le range au nombre des ennemis publics. Or « entre le peuple et ses ennemis il n’y a rien de commun que le glaive ; il faut gouverner par le fer ceux qui ne peuvent l’être par la justice » ; il faut « comprimer » la majorité monarchique ou neutre ; « la république ne sera fondée » que le jour où les sans-culottes, seuls représentants de « la nation, seuls citoyens, régneront par droit de conquête ». — Cela s’entend, et de reste[2]. Le régime dont

  1. Moniteur, XVIII, 106 (Rapport de Saint-Just, sur l’organisation du gouvernement révolutionnaire, 10 octobre, et décret conforme). — Ib., 473 (Rapport de Billaud-Varennes, sur un mode de gouvernement provisoire et révolutionnaire, 13 novembre, et décret conforme). — Ib., 479 (séance du 22 novembre 1793, discours d’Hébrard, orateur d’une députation du Cantal), « Un comité central de surveillance, une armée révolutionnaire ont été établis dans notre département. Les aristocrates, les gens suspects, douteux, les modérés, les égoïstes, tous les Messieurs, sans distinction de ceux qui n’ont rien fait pour la Révolution d’avec ceux qui ont agi contre elle, attendent, dans les lieux de réclusion, les mesures ultérieures que nécessitera l’intérêt de la République. J’ai dit sans distinction des insouciants d’avec les suspects ; car nous tenons à ces paroles de Solon : Qui n’est pas pour nous est contre nous. » (Mention honorable au procès-verbal.)
  2. Moniteur (séance du 26 mars 1791), discours de Danton :