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LES GOUVERNANTS


blées de section qui maintiennent encore un simulacre de souveraineté populaire, ils règnent despotiquement et sans conteste. — « Douze ou quinze[1] hommes en bonnet rouge, éclairés ou non, s’arrogent le droit exclusif de tout dire et de tout faire, et, s’il arrive qu’un autre citoyen, dont les intentions sont pures, veuille proposer des mesures qu’il croit justes et qui le sont effectivement, ou ces mesures ne sont point écoutées, ou, si elles le sont, ce n’est que pour que tous les membres composant l’assemblée soient témoins du peu de cas que l’on en fait. Elles sont donc rejetées par cela seul qu’elles n’ont point été présentées par un de ces hommes à bonnet rouge, ou par un de ceux qui sont, comme eux, initiés dans les mystères de la section. » — « Quelquefois, dit un de ces meneurs[2], nous ne nous trouvons que dix de la Société à l’assemblée générale de la section ; mais nous suffisons pour faire trembler le reste. Lorsqu’un citoyen de la section fait une proposition qui ne nous convient pas, nous nous levons tous, et nous crions que c’est un intrigant, un signataire (des anciennes pétitions constitutionnelles). C’est ainsi que nous imposons silence à ceux qui ne sont pas dans le sens de la Société. » — L’opération est d’autant plus aisée que, depuis le mois de septembre 1793, la majorité, composée de bêtes de somme, marche à la baguette. « Quand il

  1. Archives nationales, F7, 31167 (Rapport du 1er  nivôse an II, par Leharivel).
  2. Dauban, Paris en 1794, 307 (Rapport du 29 mars 1794). Il s’agit ici de la section des Piques (place Vendôme).