bles, les manières douces, un tour heureux de physionomie, les grâces du corps, la culture de l’esprit, tous les dons de la nature étaient autant de causes de proscription. » On se dénonçait soi-même comme aristocrate, quand on ne s’était pas fait sans-culotte et prolétaire de mœurs, de façon, de ton, de langage et d’habits. C’est pourquoi, « par un genre d’hypocrisie inconnu jusqu’à ce jour, des hommes qui n’étaient pas vicieux se croyaient obligés de le paraître ». Bien pis, « on craignait même d’être soi, on changeait de nom, on se déguisait sous des costumes grossiers et dégoûtants, chacun redoutait de ressembler à lui-même ». — Effectivement, selon le programme jacobin, tous les Français doivent être refondus[1] dans un seul moule uniforme ; on les prendra tout petits, on leur imposera la même éducation, l’éducation d’un artisan, d’un campagnard, d’un enfant de troupe, et déjà les adultes, avertis par la
- ↑ Tableau des prisons de Toulouse, par Pescayre, détenu, an III, 317 (22 messidor an II). Pinson, secrétaire du concierge, catéchisait ainsi le vieux duc de Gramont : « Citoyen, ta détention est un moyen de conversion que la patrie te ménage. Huit de tes proches, pour n’avoir pas su profiter de ces moyens, ont porté leurs têtes sur l’échafaud. Qu’as-tu fait pour te soustraire au glaive de la justice ? Parle, quels sont tes sentiments ? Expose-nous tes principes. As-tu seulement renoncé à la morgue de l’ancien régime ? Crois-tu à l’égalité établie par la nature et décrétée par la Convention ? Quels sont les sans-culottes que tu fréquentes ? Ta cellule n’est-elle pas le réceptacle des aristocrates ?… C’est moi qui, à l’avenir, ferai ta société ; c’est moi qui te ferai connaître les principes républicains, qui te les ferai aimer, et qui me charge de te corriger. »
Marseille… Le système de persécution contre les hommes à talent était organisé… » On criait dans les sections : « Défiez-vous de cet homme, car il a fait un livre ».