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LA RÉVOLUTION


Tout de suite ils ont pris le ton et l’arrogance de la dictature ; « l’orgueil est monté au plus haut période[1] : … tel qui, hier sans emploi, était aimable et honnête, est devenu fier, insolent, hautain, parce que, trompés par l’apparence, ses concitoyens l’ont nommé commissaire ou lui ont donné un emploi quelconque ». Désormais il a les façons d’un aga parmi les infidèles, et, quand il commande, c’est haut la main. — Le 20 vendémiaire an II, « au milieu de la nuit », le comité de la section des Piques fait appeler M. Bellanger, architecte : on lui signifie qu’on a besoin de sa maison, à l’instant, pour en faire une nouvelle Bastille. — « Mais, dit-il, je n’ai pas d’autre bien ; il y a plusieurs locataires ; elle est décorée de modèles d’art ; elle n’est pas propre à cet usage. » — « Ta maison, ou en prison. — Mais il faudra payer des indemnités aux locataires. — Ta maison, ou en prison ; quant aux indemnités, nous avons des logements vacants, à la Force ou à Sainte-Pélagie, pour tes locataires et pour toi. » Incontinent, douze factionnaires du poste viennent occuper l’immeuble ; on accorde au propriétaire six heures pour déménager ; désormais l’entrée de sa maison lui est interdite ; les bureaux auxquels il en réfère interprètent son obéissance forcée comme une « adhésion tacite », et bientôt lui-

    tion. La commission demandée par Terrasson est arrêtée. » — On voit qu’ils maintiennent énergiquement leur monopole. — Cf. Moniteur, XIX, 637 (13 ventôse). Motion adoptée par les Jacobins, pour obliger les ministres à chasser de leurs bureaux tout individu exclu de la Société.

  1. Dauban, ib., 307 (Rapport du 9 germinal).