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LA FIN DU GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


« jorité absolue des suffrages… Tout le monde s’était porté aux élections pour ne laisser nommer électeur aucun des Terroristes, qui annonçaient que leur règne allait revenir. » — Aux environs de Blois, un propriétaire rural, le plus circonspect et le plus passif des hommes, note dans son journal[1] que « c’est le moment de payer de sa personne… Tout homme bien pensant s’est promis de ne refuser aucune place où on le nommera, pour en fermer la porte à tous les Jacobins… On espère, non sans raison, que le plus grand nombre des électeurs ne seront point Terroristes, et que, la majorité du Corps législatif étant bonne, la minorité des enragés, qui n’a plus qu’un an d’existence, fera place, en 1798, à des gens probes et point chargés de crimes… Dans les campagnes, les Jacobins ont eu beau faire : les gens aisés, qui employaient une partie des votants, eurent leurs suffrages, et tout propriétaire voulait l’ordre… Les modérés acceptaient de voter n’importe pour quel candidat, pourvu qu’il ne fût pas Jacobin… Dans le département, sur 230 électeurs, il y en eut 180 qui étaient des gens honnêtes et probes… Ceux-ci s’attachaient à la dernière Constitution comme à leur seul palladium, tous sans songer à rétablir l’ancien régime, sauf un petit nombre ». — Rien de plus net que leur but : ils sont pour la Constitution contre la Révolution, pour le pouvoir limité contre le pouvoir discrétionnaire, pour la propriété

  1. Dufort de Cheverny, Mémoires (mars 1797).