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LA FIN DU GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


« écoles à chapelle et à confessionnal, et les députés qui, en 92 et 93, se sont le plus élevés contre les prêtres ne regardent plus leur fille comme bien élevée que quand elle a fait sa première communion ». — Les petits sont encore plus hostiles que les grands. « Un fait malheureusement trop certain, écrit le commissaire d’un canton rural[1], c’est que le peuple en masse ne paraît vouloir d’aucune de nos institutions… Il est de bon ton, même parmi le peuple des campagnes, de paraître dédaigner tout ce qui tient aux usages républicains… Nos riches laboureurs, qui ont le plus gagné à la Révolution, se montrent les ennemis les plus acharnés de ses formes : un citoyen, qui dépendrait d’eux en la moindre chose et qui s’aviserait de leur donner la qualification de citoyen, serait à l’instant chassé de leur maison. » Citoyen est une injure, et patriote, une plus grosse injure ; car ce nom signifie Jacobin, partisan des égorgeurs, des voleurs et de ce qu’on appelle alors « les mangeurs d’hommes[2] ». — Bien pis, à force de fausser le mot, on a discrédité la

    22 octobre 1799 : « C’est aujourd’hui que part la colonne mobile ; elle ne compte pas plus de soixante personnes ; encore ce sont tous des commis payés ou non payés, attachés à la République tous ceux du département, du directeur des domaines, enfin de tous les bureaux. »

  1. Schmidt, III, 343 (Rapport de Guyel, commissaire du Directoire près le canton de Pierrefitte, Seine, germinal an VI).
  2. La Fayette, Mémoires, II, 162 (Lettre du 2 juillet 1799) : « L’autre jour, à la messe de Saint-Roch, un homme, à côté de notre cher Grammont, disait avec ferveur : Mon Dieu, ayez pitié de nous, exterminez la nation ! — Il est vrai que cela signifiait seulement : Mon Dieu, délivrez-nous du système conventionnel ! »