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LA RÉVOLUTION


« race à détruire, c’est un pays à coloniser de nouveau… Je le répète, le seul moyen d’opérer la révolution dans les départements fédéralisés, et surtout dans celui-ci, c’est d’en éloigner tous les naturels en état de porter les armes, de les disséminer dans les armées et de les remplacer par des garnisons, qu’il faudra encore avoir soin de changer souvent. » — À l’autre extrémité du territoire, en Alsace, « les sentiments républicains sont encore dans le berceau[1] ; le fanatisme est extrême et incroyable ; l’esprit des habitants, en général, n’est aucunement révolutionnaire… Ce n’est que l’armée révolutionnaire et la sainte guillotine qui les guériront de leur aristocratie puante ; ce n’est qu’en faisant tomber les têtes coupables que les lois seront exécutées, car presque toutes les municipalités des campagnes ne sont composées que de riches, de clercs, de ci-devant baillifs, presque toujours attachés à l’ancien régime. » — Et, dans le reste de la France, la population, moins récalcitrante, n’est pas plus jacobine ; là où le peuple se montre « humble et soumis », comme à Lyon et à Bordeaux, les observateurs déclarent que c’est par terreur pure[2] ; là

  1. Archives des affaires étrangères, tome 1411 (Lettre de Haupt, 26 brumaire an II). — Tome 333 (Lettre de Blessmann et de Hauser, 4 pluviôse an II).
  2. Archives des affaires étrangères, tome 333 (Lettre de Chartres et de Caillard, Commune-Affranchie, 21 nivôse). — Tome 331 (Lettres de Desgranges, Bordeaux, 8 brumaire et 3 frimaire) : « Les offrandes en argenterie et en numéraire se multiplient à l’infini ; tout va. Le tribunal militaire a condamné à la peine de mort Dudon, fils de l’ex-procureur général au ci-devant parlement de Bordeaux, Roullat, procureur-syndic du département,