« comme je voudrais qu’il le fût. » C’est le dévouement qu’il exige, et, par dévouement, il entend la donation irrévocable et complète « de toute la personne, de tous les sentiments, de toutes les opinions ». Selon lui, écrit un témoin[1], « nous devions abandonner jusqu’à la plus petite de nos anciennes habitudes pour n’avoir plus qu’une pensée, celle de son intérêt et de ses volontés ». — Pour plus de sûreté, ses serviteurs doivent éteindre en eux le sens critique : « Ce qu’il craint le plus, c’est que, près ou loin de lui, on apporte ou l’on conserve seulement la faculté de juger. » — « Sa pensée[2] est une ornière de marbre » de laquelle aucun esprit ne doit s’écarter. — Surtout, que deux esprits ne s’avisent pas d’en sortir ensemble et du même côté ; leur concert, même inactif, leur entente, même privée, leur chuchotement presque muet, est une ligue, une faction, et, s’ils sont fonctionnaires, « une conspiration ». Avec une explosion terrible de colère et de menaces[3], il déclare, à son retour d’Espagne, « que ceux qu’il a faits grands dignitaires et ministres
- ↑ Mme de Rémusat, II, 379.
- ↑ Souvenirs du feu duc de Broglie, I, 230. (Paroles de Maret, à Dresde, en 1813 ; probablement il répète un mot de Napoléon.)
- ↑ Mollien, II, 9.
dévoûment de Maret et du sien : « Si l’Empereur nous disait à tous les deux : « Il importe aux intérêts de ma politique de détruire Paris sans que personne en sorte et s’en échappe. » Maret garderait le secret, j’en suis sûr ; mais il ne pourrait s’empêcher de le compromettre cependant en faisant sortir sa famille. Eh bien ! moi, de peur de le laisser deviner, j’y laisserais ma femme et mes enfants. » (Ce sont là des bravades de servilité, des exagérations de paroles, mais significatives.)