Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/393

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le seul contact d’une société pensante, le catholicisme s’y tempérait, s’écartait des traditions italiennes, récusait le concile de Trente, atténuait le culte des images, s’alliait à la philosophie, subissait l’ascendant des laïques fidèles, mais lettrés et raisonneurs. Que serait-ce au milieu des audaces, des découvertes et des séductions de la civilisation contemporaine ? Déplacer ou détrôner le pape, c’est, au bout de deux siècles, transformer la foi. »

Réponse : « Tant mieux. À côté des catholiques superstitieux, il y a les véritables, et nous en sommes ; que l’Église se réforme et se métamorphose sagement, lentement, au contact adouci de l’esprit moderne, c’est ce que nous souhaitons. — Pour les schismes, ils sont aussi menaçants sous un pape protégé que sous un pape dépossédé ; la puissance qui tient garnison à Rome a le même ascendant sur lui que le prince dont il sera le sujet ou l’hôte. S’il est un expédient qui garantisse son indépendance, c’est le nôtre ; nous lui donnerons la rive droite du Tibre, Saint-Pierre, Civita-Vecchia ; il vivra là dans une petite oasis, avec une garde d’honneur et des contributions fournies par tous les États catholiques, sous la protection et parmi les respects de l’Europe. — Quant au danger de réunir les pouvoirs spirituel ou temporel dans la main du prince, permettez-nous de vous dire que la chose est ainsi dans les pays protestants, par exemple en Angleterre, et que ces pays n’en sont pas moins libres. La réunion des deux pouvoirs ne produit donc pas toujours la servitude ; elle la consolide dans certains États ; elle ne l’implante pas dans les autres. En attendant, souffrez que nous la repoussions du nôtre, où elle l’établit. S’il y a un péril