Page:Taine - Voyage en Italie, t. 2, 1876.djvu/53

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tholique et croyant, blâme le Diritto, journal jacobin et excessif, pense que la religion peut s’accommoder avec le gouvernement civil. Ce qu’il désapprouve, c’est l’autorité temporelle du clergé ; que les prêtres se réduisent à leurs fonctions de prêtres, administrent les sacrements et donnent l’exemple des bonnes mœurs ; une fois contenus, ils deviendront meilleurs. À Orvieto, où il vit, on attribue aux moines beaucoup d’enfants de la ville, et c’est un mal. Il admire notre clergé qui est si décent, qui ne donne jamais de scandales ; il approuve le costume spécial que portent nos prêtres (en Italie, ils ne sont tenus qu’à s’habiller de noir) ; il raille ces monsignors romains préposés aux mœurs, surveillants des théâtres, qui vont dans la loge de la première danseuse lui défendre d’avoir des caprices. Selon lui, un tel état de choses provoque les gens contre la religion elle-même. À Sienne, aux vitres des boutiques, nous venons de voir la traduction du Maudit, de la Vie de Jésus du dernier livre de Strauss ; une gravure représentait la Vérité qui foudroie les prêtres entêtés et les hypocrites.

Mon impression, de Pérouse à Sienne, est que ce pays est semblable à la France. Les villageois sont à peu près aussi bien vêtus que les nôtres ; ils ont plus de chevaux ; beaucoup d’entre eux sont propriétaires. L’aspect des villages et des petites villes reporte l’esprit vers notre Midi. La contrée a la même structure, petites vallées et montagnes médiocres ; le sol semble aussi bien cultivé. Les anecdotes de garnison que me conte mon jeune officier, les intérieurs d’auberge et de petite bourgeoisie où je jette un regard, me rappellent trait pour trait un voyage que l’an dernier j’ai fait dans le centre et dans le