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Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/164

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les ongles en pointes, et au même temps, il s’arrachoit les poils du nez devant tout le monde : il y prétend pourtant ; il est vrai qu’au prix de Chapelain il pourroit passer pour tel, au moins pour son ajustement, car il est toujours assez propre.


LE MARÉCHAL DE BASSOMPIERRE

Le maréchal de Bassompierre étoit d’une bonne maison entre la France et le Luxembourg ; la plupart des lieux de ce pays-là ont un nom allemand et un nom françois : Betstein est le nom allemand, et Bassompierre le françois.

On conte une fable qui est assez plaisante. Un comte d’Angeweiller, marié avec la comtesse de Kinspein, eut trois filles qu’il maria avec trois seigneurs des maisons de Croy, Salm et de Bassompierre, et leur donna à chacune une terre et un gage d’une fée. Croy eut un gobelet et la terre d’Angeweiller ; Salm eut une bague et la terre de Phinstingue ou Fenestrange, et Bassompierre eut une cuiller et la terre d’Angeweiller. Il y avoit trois abbayes qui étoient dépositaires de ces trois gages, quand les enfants étoient mineurs : Nivelle pour Croy, Remenecourt pour Salm, et Epinal pour Bassompierre. Voici d’où vient cette fable.

On dit que ce comte d’Angeweiller rencontra un jour une fée, comme il revenoit de la chasse, couchée sur une couchette de bois, bien travaillée selon le temps, dans une chambre qui étoit au-dessus de la porte du château d’Angeweiller ; c’étoit un lundi. Depuis durant l’espace de quinze ans, la fée ne manquoit pas de s’y rendre tous les lundis, et le comte l’y alloit trouver. Il avoit accoutumé de coucher sur ce portail, quand il revenoit tard de la chasse, où qu’il y alloit de grand matin, et qu’il ne vouloit pas