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Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/297

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de Richelieu. Il se fit ensuite commissaire de l’artillerie. et y fut tué. Il n’osa se venger de Desmarets, à cause du cardinal, qui ne le lui eût pas pardonné.

Le cardinal, après que Mondory eût cessé de monter sur le théâtre, faisoit jouer les deux troupes ensemble chez lui, et il avoit dessein de n’en faire qu’une. Baron et la Villiers,, avec son mari, et Jodelet même allèrent à l’Hôtel de Bourgogne. D’Orgemont et Floridor, avec la Beaupré, soutinrent la troupe du Marais, à laquelle Corneille, par politique, car c’est un grand avare, donnoit ses pièces ; car il vouloit qu’il y eût deux troupes.

D’Orgemont, à mon goût, valoit mieux que Bellerose, car Bellerose étoit un comédien fardé, qui regardoit où il jetteroit son chapeau, de peur de gâter ses plumes : ce n’est pas qu’il ne fît bien certains récits et certaines choses tendres, mais il n’entendoit point ce qu’il disoit. Le Baron de même n’avoit pas le sens commun ; mais si son personnage étoit celui d’un brutal, il le faisoit admirablement bien. Il est mort d’une étrange façon. Il se piqua au pied, en marchant trop brutalement sur son épée, comme il faisoit le personnage de don Diègue, au Cid, et la gangrène s’y mit. Floridor était amoureux de la femme de Baron, et une fois qu’il sembla au mari qu’elle avoit parlé trop passionnément à Floridor, au sortir de la scène, il lui donna deux bons soufflets. Elle est encore fort jolie ; et n’est pas une merveilleuse actrice, mais elle est fort bien, et elle réussit admirablement pour la beauté ; cependant elle a eu seize enfants.

D’Orgemont mourut bientôt après. Floridor, qui y est aujourd’hui, lui succéda. Il jouoit encore au Marais (1649) avec la Beaupré, vieille et laide, quand il arriva une assez plaisante chose. Sur le théâtre, elle et une jeune comédienne se dirent leurs vérités. « Eh bien ! dit la Beaupré, je vois bien, Mademoiselle, que vous voulez me voir l’épée à la main. » Et en disant cela, c’étoit à la farce, elle va