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fois et ne perdoit pas un jour d’Académie ; même il lui prit une telle amitié pour elle, qu’il disoit qu’il n’avoit d’amis que messieurs de l’Académie. Il prit pour son procureur le beau-frère de M. Chapelain, parce qu’il lui sembloit que cet homme étoit beau-frère de l’Académie. Un jour, sortant de l’Académie où sa femme l’étoit venu prendre, pensant parler à Patru, il parla à Chapelain et lui offrit de le remener comme il l’avoit amené. Chapelain le remercie ; il descend. Et quand ils furent loin, sa femme lui dit : « Où est donc M. Patru ? — Ah ! dit-il ; vous verrez que j’ai cru parler à lui et j’ai parlé à un autre. » Il retourna, mais Patru n’y étoit plus.

Ce bon homme est devenu avare. Au dernier voyage qu’il a fait ici, il n’a point été voir Patru, lui qui le voyoit tous les jours auparavant, parce que les écritures que Patru a pu faire pour lui pourroient monter à quelque chose. Il ne connoît guère bien Patru ; il n’auroit garde de prendre de son argent.




M. DE BRANCAS[1].


M. de Brancas, fils du duc de Villars, est aussi un grand rêveur. À l’hôtel de Rambouillet, un jour qu’il

  1. La clef des Caractères de La Bruyère nous indique que c’est lui qui est peint sous le nom du distrait Ménalque, chapit. II. En effet, plusieurs des Rêveries rapportées ici par Tallemant ont servi au portrait tracé par La Bruyère.