Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/144

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y avoit dîné, son laquais le vint demander ; il revint : « C’est, dit-il, qu’il m’apportoit mon manteau. — Votre manteau ! lui dit-on ; hé ! étiez-vous ici sans manteau ? — Non, dit-il, mais j’avois pris hier celui de Moret pour le mien. » Or celui de Moret étoit de velours et l’autre de camelot.

En priant Dieu il lui dit : « Seigneur, je suis à vous autant que qui que ce soit, je suis votre serviteur très-humble plus qu’à personne. » Il lui fait des compliments en rêvant. Une fois qu’il se retiroit à cheval, des voleurs l’arrêtèrent par la bride. Il leur disoit : « Laquais, de quoi vous avisez-vous ? Laissez donc aller ce cheval, » et ne s’en aperçut que quand il eut le pistolet à la gorge.

À Rouen il étoit chez M. d’Héquetot, fils de M. de Beuvron ; son carrosse se rompit. Héquetot lui dit : « Prenez le mien, vous enverrez quérir le vôtre, quand il sera raccommodé. — Bien, dit-il, » et s’en va de ce pas se mettre dans celui dont on avoit ôté les chevaux, tire les rideaux et dit : « Au logis. » Il y fut une bonne heure. Enfin il se réveille et se met à crier : « Hé ! cocher, quel tour me fais-tu faire ? n’arriverons-nous d’aujourd’hui ? » À sa voix, son cocher vint à lui : « Hé ! monsieur, j’ai mis les chevaux à l’autre carrosse, je vous attends il y a long-temps. »

On dit qu’il se mit au lit une fois à quatre heures, parce qu’il trouva sa toilette mise.

Au sortir des Tuileries, un soir il se jeta dans le premier carrosse ; le cocher touche, il le mène dans une maison. Il monte jusque dans la chambre sans se reconnoître. Les laquais du maître du carrosse l’avoient pris pour leur maître qui lui ressembloit assez de