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fait aux auberges, que son assiette avoit mangé pour lui[1].

M. de Paris avoit fait autrefois beaucoup de dépense : il avoit musique et grand équipage ; il en retrancha un peu, et rompit sa musique. On dit que ses affaires nettoyées, il lui resta plus de cent mille livres de rente ; cependant il se traitoit si mal qu’il n’eût osé donner à dîner à personne sans être averti. Il a toujours fort bien entretenu ses maisons de plaisance : Noisy, vers Villepreux, que Bossuet, secrétaire du conseil, a acheté, et le jardin de Saint-Cloud.

Nonobstant la fine v..... qui le rongeoit, il n’a pas laissé de vivre assez long-temps. Depuis quelques années, le vice l’avoit quitté absolument ; il n’y avoit plus moyen de rire.

Si c’eût été un homme de bonne vie, il arriva une chose à Saint-Cloud qui l’eût fait passer pour saint ; on eût dit que c’étoit un miracle. Un pauvre diable qu’on alloit pendre à Saint-Cloud voulut avoir la bénédiction de M. l’archevêque ; par hasard, il y étoit alors : on le lui mène ; il se jette à genoux, et lui demande la vie. « Je ne puis, dit l’archevêque ; mais je te donne ma bénédiction. » On jette le galant, la potence se rompt, le peuple le sauve. Depuis on demanda à ce pendu à quoi il avoit pensé quand on l’eut jeté. « Je croyois, dit-il, assister à une penderie en l’autre monde. »

On dit que ce fut à cet archevêque qu’un jésuite dit : « Pour vous, monseigneur, vous êtes le plus grand

  1. Le Plessis Guénégaud s’amusoit à payer cette grosse tripière comme un tendron ; c’est parce qu’elle étoit de qualité. (T.)