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avant que de mourir ; son fils, qui n’avoit alors que dix-sept ans, en reçut un si grand déplaisir qu’il se résolut de quitter son pays, et suivit M. le Grand Prieur en Provence, dont il étoit gouverneur, et fut avec lui jusqu’à sa mort[1].

Pendant son séjour en Provence, il gagna les bonnes grâces de la fille d’un président d’Aix, nommé Coriolis, veuve d’un conseiller de ce parlement, et l’épousa depuis. Il en eut plusieurs enfants, entre autres une fille, qui mourut de la peste à l’âge de cinq ou six ans, laquelle il assista jusqu’à la mort, et un fils qui fut tué malheureusement à l’âge de vingt-neuf ans, comme nous dirons ensuite.

Les actions les plus remarquables de sa vie sont que, pendant la Ligue, lui et un nommé La Roque, qui faisoit joliment des vers, et qui est mort à la suite de la reine Marguerite[2], poussèrent M. de Sully deux ou trois lieues si vertement, qu’il ne l’a jamais oublié, et c’étoit la cause, à ce que disoit Malherbe, qu’il n’avoit jamais pu rien avoir de considérable d’Henri IV, depuis que M. de Sully fut dans les finances.

Dans un partage de quelque butin qu’il avoit fait, un capitaine l’ayant maltraité, il l’obligea à se battre contre lui, et lui donna d’abord un coup d’épée au travers du corps qui le mit hors de combat.

Depuis la mort de M. le Grand Prieur[3], il fut en-

  1. Ce M. le Grand Prieur étoit bâtard de Henri II, et frère de madame d’Angoulême, veuve du maréchal de Montmorency, dont nous avons parlé dans l’historiette du connétable de Montmorency. (T.)
  2. Les œuvres de ce poète ont été réunies sous ce titre : Œuvres du sieur de La Roque de Clairmont en Beauvoisis, dédiées à la reine Marguerite, Paris, 1606, petit in-12.
  3. M. le Grand Prieur fut tué par un nommé Altoviti, qui avoit été