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M. DE BELLEGARDE[1],
ET BEAUCOUP DE CHOSES DE HENRI III.


Les gens qui connoissoient bien M. de Bellegarde (comme M. de Racan) disent qu’on a cru trois choses de lui qui n’étoient point : la première, que c’étoit un poltron ; la seconde, qu’il étoit fort galant ; la troisième, qu’il étoit fort libéral. À la vérité, il ne recherchoit pas le péril, mais il ne manquoit nullement de cœur ; dans la suite nous en verrons des preuves. Il avoit le port agréable, étoit bien fait, et rioit de fort bonne grâce. Son abord plaisoit ; mais hors quelques petites choses qu’il disoit assez bien, tout le reste n’étoit rien qui vaille. Ses gens étoient toujours déchirés, et hors que ce fût pour quelque entrée, ou pour quelque autre chose semblable, il n’eût pas voulu faire un sou de dépense ; mais dans les occasions d’éclat, la vanité l’emportoit. Il n’étoit point trop bel homme de cheval, à moins que d’être armé, car cela le faisoit tenir plus droit. Il étoit grand et fort, et portoit fort bien ses armes. Je n’ai que faire de dire que sa beauté lui servit fort à faire sa fortune auprès de Henri III. On sait ce que dit un courtisan de ce temps-là, à qui on reprochoit qu’il ne s’avançoit pas comme

  1. Roger de Saint-Lary, duc de Bellegarde, grand-écuyer de France, né vers 1563, mort le 13 juillet 1646.