Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/13

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



LE MARÉCHAL D’EFFIAT[1].


Voici un maréchal de France dubiæ nobilitatis[2] : il s’appeloit Coiffier en son nom. On a dit, pour le déprimer encore davantage, que la Coiffier, traiteuse, étoit sa parente. C’étoit un fort bel homme et fort adroit. Quand le duc de Savoie, le bossu, vint à Paris, Henri IV fit faire une grande course de bague. Il garda d’Effiat pour la fin : il mit dix dedans tout de suite. Il ne donna qu’une atteinte à la onzième ; mais pour réparer cela, il jeta sa lance en avant, la reprit, et finit en mettant dedans. Tout le monde l’admira.

Beaulieu-Ruzé[3], un secrétaire d’État, qui portoit l’épée, le fit son héritier, à condition qu’il prendroit son nom et ses armes. D’Effiat étoit adroit courtisan ; il plut au cardinal de Richelieu. Il fut envoyé pour le mariage de la reine d’Angleterre[4]. On le blâma d’a-

  1. Antoine Coiffier, marquis d’Effiat, né en 1581, mort le 27 juillet 1632.
  2. Il étoit pourtant gentilhomme. Son aïeul (*) ou son bisaïeul, général des finances, fut fait noble pour avoir demandé une pique à la bataille de Cérisolles, et y avoir bien fait. J’ai trouvé dans l’Histoire de Mézeray, ces mots, parlant de Gilbert Coiffier d’Effiat, à cause de la faveur de Henri III qui lui avoit donné charge d’agir en Auvergne : « Il avoit pris rang parmi les gentilshommes, quoiqu’il ne fût pas de race noble. » (T.)

    (*) C’est son aïeul, Gilbert II.

  3. Son grand-oncle maternel.
  4. Henriette de France, fille d’Henri IV, avec Charles Ier en 1624.