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l’argent à l’archevêque : « Ma sœur, dit-il à la dame, voilà le plus honnête homme qu’on puisse trouver. Je vous prie, baisez-le pour l’amour de moi. » Elle le caressa tant qu’il n’osa demander un sou.

Comme on lui disoit : « À faire comme cela, vous ne trouverez plus d’argent. — J’en trouverai bien, disoit-il, mais je ne trouverai pas de caution ; c’est une maudite invention que ces cautions. »

Le propre syndic de ses créanciers ne se pouvoit défendre de lui. C’étoit Ballin, bourgeois de Paris. Car pour les satisfaire, il avoit fallu, selon l’ordonnance, leur abandonner la moitié du revenu. Or, ce pauvre homme, par mauvais ordre, n’avoit pas rendu compte, et ne savoit comment s’y prendre. Quand M. de Reims vouloit avoir de l’argent de lui, il le faisoit assigner pour rendre compte, et l’autre, pour n’en pas venir là, lui donnoit quelque somme, tirant parole que ce seroit la dernière. Mais au bout de six mois l’archevêque recommençoit. Quand Fontelaye mourut, il fit tout saisir, disant qu’il ne lui avoit pas rendu compte ; et enfin tout lui demeura. Son maître-d’hôtel mort, il se saisit de six mille livres qu’avoit cet homme. Les parents les lui voulurent redemander ; il leur fit accroire qu’ils avoient voulu assassiner son valet-de-chambre, et les fit mettre en prison.

Il disoit un jour : « Je veux acquitter mes dettes, j’ai quatre-vingt-quatre mille livres de rente, je dois six à sept cent mille livres. Il me faut quarante mille livres pour ma dépense, autant pour mes créanciers. » Voyez combien il eût fallu qu’il eût vécu pour cela, ne payant que quarante mille livres par an.